Source : Archivchemindefer
Fernand Nouvion est né à Neuilly sur
Seine en 1905. Son attirance pour le chemin de fer électrique
remonte à sa prime jeunesse puisqu'il se voit offert à
l'age de sept ans son premier train Märklin. Formé à
l'Ecole supérieure d'électricité, aujourd'hui
Sup'Elec dont il fera partie du corps enseignant, il cherche à
entrer au chemin de fer au début des années 1930 et,
naturellement, à la plus électrique des compagnies de
l'époque, le P.-O. Mais là, on lui conseille de
s'adresser plutôt aux Chemins de fer de l'Etat
«...où l'on est moins regardant sur la qualité des
candidats »
ainsi qu'il aimait à le raconter. Sous la férule de Raoul Dautry,
l'Etat est alors sur le
point de lancer l'électrification de la ligne de Bretagne entre
Paris Montparnasse et Le Mans. Le jeune ingénieur est
affecté au service du Matériel, auprès de Marcel
Garreau, le responsable de ce programme d'électrification. C'est
ainsi qu'il participe à la mise au point de rames automotrices
de ramassage, des engins aux fortes
accélérations destinés à assurer une
desserte omnibus rapide, mais ce qui l'amène à déplorer que les chemins
de fe que le service de l'Exploitation des Chemins de fer de
l'Etat ne s'intéresse guère à la vitesse.
Avec la nationalisation et après la défaite de 1940,
Nouvion est nommé chef d'arrondissement 'matériel' des
Batignolles sur la région Ouest de la SNCF, responsable des
ateliers d'entretiens de La Folie à Nanterre. C'est là
qu'il va donner la preuve de ses incontestables talents d'organisateur,
non sans quelques conséquences fâcheuses dues aux
circonstances. Les ateliers de la Folie sont
chargés de la révision générale des
locomotives de la ligne Paris-Le Mans, une opération qui ne
nécessitait pas moins d'une quinzaine de jours en atelier.
N'étant pas desservis par le réseau 1500 volts, mais par
le 850 volts troisième rail de la banlieue Saint Lazare, les
machines du dépôt de Montrouge y sont amenées par
une BB d'origine 'Etat', la 822, équipée en bitension et
de deux systèmes de captage. Nouvion y introduit de nouvelles
méthodes de travail, imaginant une planification
raisonnée des tâches d'entretien lesquelles consistent
à travailler simultanément sur différents
sous-ensembles de la locomotive, freins, contacteurs, etc., puis
à effectuer un contrôle de qualité avant leur
remontage. Il obtient ainsi une réduction à cinq jours du
délai nécessaire à la révision
générale des 2D2 5400, un résultat qui donne lieu
en avril 1942 à son premier article publié dans la 'Revue
générale des chemins de fer' sous le titre
éloquent de 'réduction des immobilisations du
matériel'. Mais dans la France occupée,
la direction des transports militaires allemands est l'un des
principaux clients de la SNCF et cette réduction
d'indisponibilités lui bénéficie au premier chef.
Bref, à la Libération, outre une adhésion non
dissimulée à l'idéologie de Vichy, son
zèle lui vaut
d'être convoqué au dépôt des Batignolles
où siège le comité d'épuration de la
région Ouest. On lui reproche un comportement qui n'est pas sans
rappeler le syndrome du 'pont de la rivière Kwaï', le
célèbre film où un officier
britannique fait prisonnier par les Japonais, pris au jeu de son
métier, construit un ouvrage sur une ligne de Birmanie. Si cet épisode n'a pas nui
à la carrière de Nouvion, il n'aimait guère en évoquer le
souvenir.
Marcel Garreau, le patron de la DETE dans les années 1950 (coll. A. Blanc)
En 1946, il entre
à la Division d'études de la traction électrique
(DETE), un département créée par la SNCF à
la veille de la guerre dans la perspective d'un ambitieux programme
d'électrification du réseau ferroviaire.
Sous la houlette de Marcel Garreau, son
directeur, la DETE est appelée
à jouer un rôle central dans la modernisation des chemins
de fers français. Nouvion aimait à le rappeler :
«on ne peut vivre le chemin de fer qu'en étant sans
arrêt sur le terrain ». A l'époque la SNCF est seule
à disposer d'un réseau qui lui permet de faire des essais
en vraie grandeur et, surtout, des crédits nécessaires au
développement de nouvelles techniques. Ainsi,
pendant une trentaine d'années, la DETE va assurer la conception
et la mise au point des nouvelles locomotives électriques de la
SNCF. Il révèle ses capacités de
meneur d'hommes, insufflant un véritable esprit de commandos
à son équipe où l'on compte Marcel Tessier,
André Cossié et quelques autres, imposant ses choix
aux bureaux d'études des constructeurs. C'est ainsi que la DETE a
été l'acteur de l'électrification des
chemins de fer en monophasé 50 période.
Mais l'affaire ne fut pas exempte d'aléas, notamment à
cause de la mauvaise commutation provoquée au démarrage par la force contre-électromotrice des moteurs
alimentés en courant alternatif. Parmi les solutions
envisageables, Nouvion parie sur la mise au point de moteurs directs,
c'est-à-dire utilisant directement le monophasé 50
périodes. Au lendemain de la guerre, la DETE suscite des essais
réalisés en Allemagne sur la ligne expérimentale
du Höllenthal avec une BB 'E 244' Siemens, mais dont le
fonctionnement est réputé provoquer des feux d'artifices
d'arcs électriques lors de la prise de vitesse, d'autres en Autriche sur les lignes de
l'Arlberg et du Brenner afin de tester les performances des grosses CC 'E 94' de la Reichsbahn : « on
faisait des démarrages lents en rampe qui torturaient les
moteurs, raconte Marcel Teissier. Les machines crachaient des
étincelles grosses comme des petits pois. Nouvion s'amusait
à taquiner les Allemands, il 'occupait' la ligne. 'Attends coco
! J'ai pas terminé, on repart...' C'est comme ça qu'il
nous est arrivé de coller six heures de retard à l'Orient
Express qui attendait derrière ». Pour ces essais, la DETE
dispose d'un train spécial composé de la voiture
électrotechnique de la Reichsbahn et d'un ex-train
spécial du Führer avec ses facilités de logement et
de restauration : «on embarquait de nombreux invités se
souvient Nouvion, les ingénieurs de Schneider-Westinghouse,
d'Alsthom, d'Oerlikon, de Siemens à laquelle
s'agrégeaient des officiers supérieurs des armées
occupantes ainsi que des 'occupés' affamés. Comme on
nourrissait bien nos gens, au fur et à mesure que nous
circulions la foule croissait et bien que l'alcool servi à la
fin du repas provienne en droite ligne de l'I.G. Farben, selon la
déclaration du maître d'hôtel, les convives se
déclaraient satisfaits du cinquante période. Certains
insistaient même pour être invité à la
cinquante et unième (!) ».

La E 244 à moteurs directs en tête d'un train sur la ligne du Höllental (DR)
Il n'empêche,
ces essais convainquent Nouvion que le moteur direct est la solution
pour développer la traction en 50 Hz. Pour la ligne de Savoie,
la SNCF confie à la firme suisse Oerlikon le soin de fournir une
CC '6051', tête d'une petite série de locomotives
d'excellente facture, mais dont le prix d'achat et les coûts
d'entretien se révèlent plus onéreux que celui des
machines à courant continu. Lors du fameux congrès
d'Annecy en 1951, les CC Oerlikon permettent à Louis Armand,
convaincu par Nouvion, d'avancer que le moteur direct rend viable la
technique du 50 périodes. Mais cette manifestation apporte aussi
la révélation d'une innovation technique qui va se
révéler décisive pour l'avenir du nouveau
système de traction, l'ignitron. Il s'agit d'un redresseur
statique qui permet de transformer l'alternatif monophasé fourni
par la caténaire en courant continu avalé par les moteurs
de traction. L'électrification de la ligne Valenciennes -
Thionville suscite donc la commande d'une quinzaine de BB 13000
à moteurs directs, mais aussi de cinq BB 12000 à
ignitrons dont les performances vont justifier pendant des décennies suivantes l'incontestable
suprématie des machines à redresseurs. Ainsi, lors d'un
nouveau congrès électrotechnique organisé à
Lille en 1955, Nouvion peut évoquer la supériorité
des machines à quatre essieux de la SNCF sur celles à six
essieux de la Bundesbahn. Quiqu'il en soit, la réussite de son
programme d'électrification incite la DETE à
institutionnaliser une collaboration internationale pour susciter la constitution d'un 'Groupement du 50 Hz'
avec les Allemands (AEG, Siemens), les Suisses (Brown-Boveri), les
Belges (Ateliers de Constructions Électriques de Charleroi) et
bien entendu, Alsthom, Jeumont-Schneider et 'SW'. Le groupement 50 Hz donne
à Nouvion l'occasion d'exercer ses capacités de vendeur.
Ainsi, il travaille à l'électrification de la banlieue
d'Istanbul, à l'électrification des chemins de fer
portugais et il participe à la conception de locomotives
destinées à l'URSS et à la Chine. En extrême
Orient, il anime une mission technique chargée
d'électrifier les 'Indian Railways'. La 1100ème
locomotive que leur livre le groupement 50 Hz est solennellement
baptisée 'Fernand Nouvion', un hommage dont il était
très fier.
En
réalité, même s'il a participé à
l'épopée technique du 50 périodes, Nouvion
était plus attiré par la mécanique que par
l'électrotechnique. Dans une conférence donnée
à l'Ecole polytechnique en 1956, il affirmait que : « le
plus important dans une locomotive, ce n'est pas le mode de traction,
mais la partie mécanique dont l'électricité ne
doit être que le serviteur ». Rappelons que dès les
lendemains de la guerre, la DETE s'est intéressée
à la conception de locomotives électriques de vitesse
à adhérence totale. Jusque-là les locomotives de
ce type proposées par les constructeurs étaient de type
2D2, c'est-à-dire équipées de moteurs
entièrement suspendus, mais dans un châssis rigide, et
munies de bogies porteurs. En fait, l'innovation est venue de Suisse
lorsqu'en 1942, la compagnie du 'Bern-Lotschberg-Simplon' a mis en
service quatre BB 251 à moteurs entièrement suspendus
aptes à courir à plus de 120 km/h pour un poids de 80
tonnes et une puissance de 4000 chevaux. En France, alors que
débute l'électrification de la ligne Paris - Lyon pour
laquelle le service 'Matériel et Traction' (MT) préconise
l'acquisition de lourdes 2D2 9100, la DETE envisage la construction de
locomotives de vitesse à adhérence totale, la
première étant la CC 7001 Alsthom. Puis, à la
suite de la fourniture par Brown Boveri de deux BB
légères, Marcel Garreau passe commande chez Schneider de
deux locomotives équipés d'une transmission à anneaux
dansants conçue par l'ingénieur André Jacquemin de
la DETE (9003 et 4).

Fernand
Nouvion (à g.) en compagnie d'Ange Parmantier, le directeur du Matériel et de la Traction de
la SNCF, lors des essais de 1955 dans les Landes (DR)
En mars 1955,
lorsque la CC 7107 et la BB 9004 sont mises à contribution pour
franchir la barre des 300 km/h sur la ligne des Landes, on doit évoquer
les enseignements que Nouvion a tiré de ces essais :
« sur la CC, outre les problèmes de captage qui ont
interrompu prématurément la tentative, on a eu des
problèmes de transmissions. Au cours de l'essai, on a
commencé à percevoir une odeur de brûlé,
indice de la destruction des silentblocs de la transmission Alsthom. A
l'arrêt à Morcenx, on pouvait nettement déceler le
fluage des bielles de transmission consécutif à la
disparition du caoutchouc des silent-blocks… Autre problème, le lendemain avec la BB, lorsqu'on a atteint
les 331 km/h, au moment de la commande 'couper courant', les
accélérations subies par la loco ont brusquement
changé de nature. Il s'est produit une sorte de mouvement de
tamis qui a duré de manière pénible pendant une
dizaine de secondes. On a cru à une nouvelle avarie de transmission et,
je le reconnais, j'ai craint le déraillement. En fait, ce
n'était pas elle qui était en cause, mais c'est la
coupure brutale de l'effort de traction qui a provoqué ce
mouvement incontrôlé (et cette déformation de la
voie que l'on aperçoit sur certaines photos prises après
les essais, cf. infra). Les appareils de mesure avaient enregistré des
accélérations de 0,25 G sur la machine et une
poussée de six tonnes sur le rail, le tiers de la valeur de la
charge sur l'essieu… En fait, l'essai de la BB nous a montré la
nécessité de monter sur les bogies des amortisseurs
anti-lacets à action rapide, un dispositif mis au point par un
fabricant hollandais (Koni) qui sera adopté ensuite sur tout le
matériel SNCF… Quant au problème de captage, je dirais
qu'en 1990 le TGV a battu son record de 515 km/h en prenant 700
Ampères à la caténaire, moi, j'en avais
pompé plus de 5000 avec la CC ! La conclusion
était claire, il fallait passer au monophasé haute
tension ».
Le fluage des biellettes de la transmission Alsthom sur la CC 7107
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La déformation de la voie après l'essai de la BB 9004 (clichés AFAC)
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Ses
réflexions de mécanicien ont conduit Nouvion
à envisager la conception d'une locomotive universelle, apte
aussi bien à la traction des trais de voyageurs à grande
vitesse qu'à celle de lourds convois de marchandises. En 1958,
lorsqu'il présente les BB '16500' conçues pour
l'électrification de la ligne Paris - Lille, il n'hésite
pas à parler d'un concept révolutionnaire en
matière de traction ferroviaire. De fait, ces machines
présentent un certain nombre de caractéristiques
originales qui assurera leur
large diffusion. Dotées de bogies monomoteurs, avec son
collaborateur Louis Lothion, il a eu l'idée de les
équiper d'une transmission à double rapport d'engrenages.
Grâce à un dispositif manoeuvrable à l'arrêt,
les '16500' se présentent comme des engins polyvalents, capables
d'assurer à 90 km/h la traction d'un train de marchandise de
1500 tonnes et de courir à 140 en tête des trains de
voyageurs. Dans un cas, le rapport basse vitesse augmente leur couple,
dans l'autre cas d'économiser 1000 ch. de puissance lors de la
traction d'un express à 140 km/h. Ces locomotives capables de
fonctionner en unités multiples sont rapidement devenues
omniprésentes sur le réseau SNCF avec près de
trois cents '16500' puis cent '17000' pour le monophasé 50
période, cent soixante dix '8500' pour le continu 1500 volts et
près de deux cents '25000' bicourants. Mais d'autres
séries de machines ont bénéficié de bogies
monomoteurs à bi réduction, les petites '9400' de 60
tonnes, mais aussi les CC
40100 capables de courir à 160 et 240 km/h engagées sur
les rapides internationaux de la région Nord. Enfin, les CC
'21000' bicourants et surtout leurs dérivées en 1500
continu, les puissantes '6500' classées comme machines mixte par
le service M-T (100/220 km/h), engagées au début de leur
carrière en tête des trains drapeaux du sud-ouest,
'Capitole', 'Aquitaine', et au sud-est sur la ligne de la Maurienne
où elles assurent le trafic avec l'Italie.
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Bogie monomoteur d'une CC 40100 (Sciences et Vie, spécial chemin de fer, 1972)
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Reste que le concept de bogie monomoteur à bi réduction
n'a pas manqué de susciter certaines critiques. La mise au point des
BB '16500' a requis la participation active et a provoqué la
grogne des ateliers de la SNCF. Lors d'une réunion
organisée par le service M-T à Salins-les-Bains au
début des années 1960, les participants se souviennent
d'un Nouvion montant au créneau pour défendre ses
conceptions : « personne au monde n'est capable de faire une
machine aussi légère, aussi performante, aussi
universelle que la '16500' et si vous avez des problèmes c'est
que vous ne savez pas les entretenir », ce qui comme on l'imagine ne
manqua pas de provoquer quelques remous dans l'assistance. De
même, leur tenue de voie vacillante due au faible empattement de
leurs bogies et à la raideur de leurs suspensions leur ont valu
des tractionnaires le sobriquet de 'danseuses'. En effet, la complexité du
bogie monomoteur à bi réduction requiert des normes de
fabrication élevées et la cascade des quatorze engrenages
de la transmission des '6500', outre un suivi attentif en
matière d'entretien, implique, du fait de leur faible taux de
giration, de circuler sur une voie
impeccablement dressée. En 1977, c'est ce que révèle
l'envoi d'une CC '21000' envoyée outre-Atlantique pour des
essais
demandés par la compagnie 'Amtrak' sur le corridor
Boston - Washington. L'échec de la
CC Alsthom pénalisée par la rusticité de la voie
nord-américaine incitera finalement la compagnie
américaine à s'équiper de plus classiques BB
suédoises (ASEA).

La CC 21004 devenue X 996 fait ses premiers tours de roues dans l'emprise de l'usine Althom de Belfort (cl. GEC Alstom)
En 1971, lorsque Jean Dupuy devient directeur du service du Matériel de la SNCF, il entend revenir
sur le concept de bi réduction dont il nie l'intérêt économique, « des bogies à
deux rapports d'engrenage ne servent à rien si on relève
la vitesse des trains de marchandise de 90 km/h à 120 Km/h
puisqu'on perd ainsi le bénéfice d'une économie de
8% sur le nombre de machines du parc » et il convie la DETE à concevoir des locomotives
conçues pour ne requérir que le minimum d'entretien.
Cette nouvelle politique donnera les 'BB 15000' en 50 Hz et leur
déclinaison en courant continu, '7200' et bicourant '22200', des
machines conçues par André Cossié, Fernand Nouvion
et Raoul Dupont, dotées de bogies monomoteurs, mais sans bi-réduction. Les 'nez cassées' ainsi appelées
à cause de leur pare-brise inversé et de leurs petits
capots bénéficient d'améliorations qui en font la
série de locos électriques la plus réussie de la
SNCF. Leurs moteurs bénéficient de nouveaux
isolants, du soudage TIG des lames de collecteurs
et d'une ventilation forcée qui les
rendent à la fois plus robustes, plus puissants et plus
légers. «Désormais, on peut piloter un moteur
électrique simplement en surveillant la température de
son collecteur » constate Nouvion, finissant par admettre que la
polyvalence d'une locomotive peut aussi reposer sur sa partie
électrique.

Peyrehorade, une BB 7200 en tête d'un train régional se dirige vers Bayonne
Le promoteur de la
grande vitesse sur rail a-t il participé à la
genèse du TGV ? Ce n'est pas le cas, au moins directement. Il
est vrai que le TGV avec sa rame articulée et insécable
et son infrastructure dédiée ne correspondent pas aux
pratiques de la DETE motivée par la traction de trains lourds
sur le réseau classique. Lors de l'élaboration du prototype '001'
à turbines à gaz, Nouvion propose un TGV à bogies monomoteurs qui
ne semble guère avoir retenu l'attention. Plus
tard, il critiquera certaines dispositions comme la choix de moteurs
synchrones pour le TGV Atlantique et leur chaîne de traction
à thyristors : « un dispositif contre-nature, dit-il, qui
transforme le courant monophasé en triphasé… Des trucs en
'trons' et en 'stors' tellement compliqués qu'ils en deviennent
un facteur majeur de pannes ». Pourtant, cette chaîne de
traction aura permis d'atteindre l'universalité par
l'électronique de puissance avec les BB 26000 dont la puissance
maximale est développée à 90 comme à 200
km/h. Evidemment, derrière l'ironie perçait l'amertume de
ne pas avoir terminé sa carrière à la direction
'M-T' de la SNCF. Il n'en reste pas moins que sa carrière comme
celle de ses collègues de la DETE illustre la glorieuse
époque où la société nationale était
l'acteur principal de l'innovation ferroviaire, une situation qui a
profondément évolué aujourd'hui, comme l'on sait.
Reste que sans le rôle crucial tenu par les ingénieurs de
la SNCF dans le passé, il n'y aurait vraisemblablement pas de
TGV aujourd'hui, c'est-à-dire un train électrique ultra
rapide circulant sur une infrastructure dédiée aux
grandes vitesses.
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